DAX: « UN COUP TU LE VOIS, UN COUP… ! »
Grande faena de Talavante, oubliée…
Le Cid « fonctionne » bien !
14 Août : « Un coup tu l’vois… un coup tu l’vois plus ! » C’est un peu
ce que l’on retiendra d’un Alejandro Talavante qui aura été, ce jour,
« bien mieux » qu’on ne le pensera, devant le troisième de la tarde, et
à l’inverse, « bien mal », devant le dernier de cette corrida
d'ouverture 2008.
En fait, toute la tarde fut un peu du même acabit,
genre « un coup tu l’vois… un coup tu l’vois plus ! »
Tout d’abord les toros : un lot de Mayalde qui, cette
fois, ne restera pas dans les annales. Toros sortant « sin fijeza »,
galopant en tous sens ; « pegajosos », collant au capes ; souvent sans
forces, fusant sur les piqueros pour des puyazos réduits. A la muleta de
même : Trois charges « très aimables », et tout à coup… la vacherie, en
dessous de la ceinture. Toros « con mobilidad », avec de la mobilité,
mais en général « sans sel », ne transmettant que peu de danger.
Pourtant, sous cette apparente noblesse, une corrida devant laquelle il
était probablement difficile « de estar a gusto », de se relâcher
vraiment.
Ensuite, les hommes...
« Un coup, tu l’vois… Curro Diaz ! »
Le Linarense toréa souvent « très joli », mais « ne
pesa » que rarement sur ses toros. Certes il baissa la main, mais ses
muuletazos furent souvent courts et rapides. Ce peu de dominio, compensé
par de magnifiques adornos, eut pour conséquences quelques « sustos »,
notamment sur la corne droite, périlleuse, du premier ; et un désarmé,
au quatrième, qui mit toute la faena par terre. N’ayant rien résolu
devant ce toro, le torero attaqua « sans confiance » à l’épée, et, sur
la troisième entrée, prit le frontal en pleine poitrine. Recherché et
repris, au sol, le diestro fit une dangereuse « pirouette » autour du
piton, et doit bien à quelque vierge Andalouse, le fait de s’en sortir
sans mal. Mais au bilan, Curro Diaz a perdu la seule opportunité de dire
qu'à part à Dax, on se souvenait bien peu de ses excellences, en 2007.
« Un coup tu l’vois… le Cid ! »
Excusable, devant son premier, dont les deux cornes
savaient un peu de Latin et de Greco-Gascon, le grand Manuel de Salteras
aurait du couper les deux oreilles du cinquième, toro noble, mais
distrait. Le Cid débuta fort, plein centre, mais « fit des passes » plus
qu’il ne toréa. Trois redondos « redondos », main basse, « toréés à
fond », liés à un joli cambio et gros pecho, en milieu de faena,
prouvèrent bien que… s’il avait vraiment voulu être « en Cid »… Alla él !
Faisant plus dans la quantité que la vraie qualité, le Cid « se paso de
faena », et tua spectaculairement, mais… de côté.
« Un coup tu l’vois… Talavante ! »
Dax ne sait pas la chance qu’elle a eue… car bien
souvent, Talavante, c’est celui « du sixième », qui ennuie autant qu’il
semble s’ennuyer. Mais attention… peut-être « conditionnée » par ce
qu’elle sait, ce qu’on lui a dit, ou ce qu’elle a vu, en certaines
télévisées, Dax n’a peut-être pas perçu, à son niveau, la faena de
Talavante, au noble troisième.
Certes ce fut un long monologue, une longue litanie de
passes, surtout dans la première partie… Mais, Señores ! nous devons
reconnaître le temple et le lié, en séries « de 6 ou 7 », tant par
derechazos allurés que naturelles, « jambe avancée » ou « pieds
joints ». D’ailleurs, le public ne s’y trompa point, qui soupira d’aise,
en plusieurs passages, sur chaque main.
Puis il y eut « la deuxième partie », complète et très
torera : le « tres en uno » que le diestro « compliqua » par un adorno
supplémentaire ; les manoletinas finales, avec le cambio dans le dos ;
les trincheras et les firmas… Pour le coup… « on les a vues ! ».
A l’heure de l’épée, Talavante mit une lame qui, « pour
lui », était tout à fait recevable, car on sait à quel point il est
mauvais tueur. Aussi, alors que l’on se disait que Talavante venait
« d’entrer en France », on fut un peu surpris d’une pétition bien
chiche, alors qu’en maint lieu d’Espagne, il coupait deux oreilles.
Peut-être même, à Séville ou même Madrid…
A Dax, imaginons que le Juli fasse la même faena… corta
dos y rabo ! A que si ?
Le problème, il est double ! Un, Dax a essayé de
retrouver en Talavante, le double de Jose Tomas, dont on lui parlait
tant. Pues no ! Et deux : Ce garçon manque tellement « de chaleur
humaine », d’expression, de sourire « vrai », que l’on a de grandes
difficultés à accrocher, même quand il est « bien », ou même « très
bien »… comme hier à Dax.
Mais au fond, tout cela est peut-être de notre faute, à
nous les « journaleux », qui avons passé quelques mois à souligner à
gros traits « le regard vide » du jeune Extremeño. Alors… battons notre
coulpe, tous ensemble, car hier à Dax, « on a vu Talavante »… Du moins à
un toro ! Parce qu’au sixième, ce fut « … un coup tu l’vois plus ! »
Et puis « Un coup tu l’vois… et le coup prochain, aussi !!! »
Que la plaza était belle, hier, remplie jusqu’au toit !
Que les clarines sonnaient bien, ensemble, « juste ! » et « con aroma ! »
Et que Dax fit bien les choses, au moment de « défendre ensemble notre
tradition Taurine ! » La ronde des gamins, au centre du ruedo, tandis
que les gradins chantaient « l’hymne de chez nous ! », en levant bien
haut les quelques mots qui disent notre identité culturelle, simplement
et sans provocation aucune… cela avait « une certaine gueule ! » Que
bueno!
Première corrida de Feria, qui aura un peu laissé l’aficion,
sur sa faim… du fait de toros « déroutants » et de toreros qui n’ont
peut-être laissé « qu’entrevoir ! »
Que voulez vous… c’est rare de « tout voir » d’un coup…
Vu ?
Mercredi 13 Août – DAX – 1ère de Feria – No hay
billetes – Beau temps revenu, agréable : Six toros du Conde de Mayalde,
de présence inégale mais « allant a mas », le premier « de peu de
cage », mais très armé. Corrida « déroutante », les toros sortant « abantos »,
distraits, ne se laissant pas toréer de cape, collant aux hommes, « pegajosos » ;
fusant aux chevaux, sans mise en suerte (sauf le Cid, au 5ème),
mais montrant vite la limite de leurs forces et de leur bravoure. Au
deuxième tiers, coupant le voyage ou « gagnant un temps » aux
banderilleros (le Boni devant saluer, pour son autorité, devant le
cinquième). Et à la muleta : «de boîtes à surprises », notamment les 1,
2 et 4èmes, mêlant le « noble, très mobile », au « sournois, sachant
mettre la corne.. ». Un toro de belle noblesse, le 3, mis encore en
confiance par la muleta « douce mais ferme » de Talavante. Un autre
noble, quoique très distrait, le 5ème, que le Cid ne parvint
pas « à captiver » tout à fait. Le dernier ne fut pas un ogre, mais « il
ne dit rien »…
Avant la corrida, joli geste de « Dax, toute entière »
en revendication de notre tradition et Culture Taurine. Au paseo, retour
discret et « con clase » de Yannick Boutet, l’alguazil de toujours.
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Curro Diaz : Ovation, au tiers ; et Silence – N’a
pas totalement convaincu… peut-être parce qu’il a besoin de toros « plus
profonds », plus « templados ». Là, il toucha un premier « moustique »,
petit de corps mais méchant de cornes, dont les idées, d’entrée,
frôlaient « le clair-obscur ». On pensait l’affaire en bonne voie, dès
la jolie demi véronique de réception, mais à la sortie d’un puyazo, la
corne droite sonna une méchante alerte. En début de faena, « andando
bien al toro », Curro Diaz mit l’eau à toutes les bouches, mais le toro
vint, « rebrincadito » parce que faible, en des charges inégales et
parfois même « incertaines ». La faena fut « légère », sans profondeur,
pourtant illuminée beaux enchaînements ornementaux, avant de basculer,
en entrant fort, une lame basse qui provoqua vomito et mort immédiate.
Dax récompensa avec justice.
Le quatrième, de belle prestance, fit de vilaines
choses au premier tiers ( achuchon au matador, dans la demie ; et le
subalterne, qui faillit bien se faire écharper). Curro Diaz débuta bien
sa faena, même s’il n’appuya aucun de ses muletazos, mais « se perdit un
peu », après un désarmé inopportun. Ne pouvant « remonter » la faena, le
matador partit à l’attaque, sans confiance et, sur la troisième lame,
courte, le toro le percuta, au pecho, l’envoya au sol où il le reprit
pour une vilaine voltereta, heureusement sans grande conséquence.
Secoué, le torero finit un peu en débandade.
« El Cid » : Silence et Une oreille –
Tomba sur un premier toro pegajoso, collant au capote, l’obligeant à
sortir vers le centre. Toro faible mais un peu « hijo p…», qui avait un
méchant hachazo droitier, en fin de passe, et n’allait pas mieux, sur la
gauche, comme le démontra le Sévillan, en une faena où « il tira des
lignes », tandis que le toro alternait « l’andarin », marchant beaucoup,
et « l’escarbando », arrêté, grattant le sable. Le Cid « douta un peu »,
mais montra qui « il aurait pu être.. », en une courte série droitière,
main basse, où il s’imposa vraiment. Estocade « ladeada » et « muy
trasera », très en arrière, et tout le monde qui boude.
Le cinquième sera un toro noble mais très distrait, que
le Cid entreprendra, au centre, le sourire aux lèvres, comme « jugando
al toro ». Il y aura une statuaire, un trincherazo et une passe du
mépris (de desprecio) de toute beauté. Pourtant, alors que l’on
s’attendait à un faenon, intense et profond, ce fut sur un océan de
légèreté que nous entraîna le muletero, liant certes les passes, mais
alternant les inégalités, sur deux mains. Faena, couvrant beaucoup de
terrain, suscitant grand espoir sur trois derechazos, main très basse,
lié à un joli cambio et au pecho final. Faena longue, trop longue, finie
en terrain de soleil, par un desplante rageur, chaleco ouvert, pecho
offert à la corne. Le Cid prépara soigneusement une lame entière, bien
poussée, mais qui alla de côté. Faena « à deux doigts de deux
oreilles… » à laquelle il manqua un peu plus de profondeur et « d’unité
de lieu ».
Alejandro Talavante : Une oreille
« forte » après un avis ; et Silence – Ne put placer qu’un de ses
classiques delantales, à la réception du troisième Mayalde, castaño,
bas, qui sortit fort et « fusa » sur le piquero. Cependant, le matador y
vit immédiate qualité et, après brindis à tous, se mit à lier les passes
comme on enfile des perles. Dans un silence surpris mais quand même de
plus en plus admiratif, Talavante enchaîna les séries de droitières, par
paquets de six ou huit muletazos, templés, limpios, mais un peu fades
d’expression. A gauche, l’intensité monta d’un cran et la plaza finit
par « remuer » sur deux ou trois trouvailles, comme un « tres en uno »
amélioré d’un adorno personnel, ou les manoletinas finales, sans
sourciller, agrémentées d’un cambio dans le dos, très propre. Faena « a
mas », très templée, close de plusieurs adornos de classe, auxquels ni
la public ni le torero (ce qui est plus grave) ne donnèrent assez
d’importance. Faena claire et « très torera », close d’une lame un peu
tendida qui n’eut pas d’effet immédiat, raison pour laquelle, peut-être,
on ne demanda aucun double trophée. Mais ce fut « la » faena du jour… et
de beaucoup d’autres.
Devant le sixième, on retrouva le Talavante « plus
obscur », plus hésitant, plus « fermé », plus fade… autant que l’était
un toro sans classe aucune, estoqué « a une tiempo », d’un trois quarts
de lame atravesado et en arrière.
Ce 13 Août, Alejandro Talavante a bien failli « entrer
en France », mais hélas, ce fut « Un coup tu l’vois ! Un coup tu l’vois
plus ! » Et ça…
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