BAYONNE : « A LA POURSUITE DES ILLUSIONS PERDUES !
Grave blessure de Denis Loré
Domingo Lopez Chaves : Important
2 Septembre : « Y me toco, me toco perdeee ! Y me toco, me toco llooora ! »
Sur l’autoroute qui file vers le sud, les phares
balaient l’obscurité, l’inconnu, le néant… Qu’y a-t-il, derrière le
prochain virage ? Quel toro, lorsque s’ouvrira le prochain chiquero ? Un
toro « de ensueño », qui permettra de « libérer » le toreo et les
qualités artistiques que l’on a « dentro », au fond de soi; ou une de
ces « saletés » que le sorteo nous a réservée, aujourd’hui à Bayonne? Et
quand on pense au pauvre Loré...« bien pire encore! »
Sur la route du retour vers Utrera, Luis Vilches a le
regard triste. Lui qui sait ce qu’est la lutte, contre les toros et
contre les hommes, dans les ruedos et les « despachos », arrive à se
demander si « cela vaut la peine ». Qu’a-t-on à gagner, devant telles « alimañas »,
sinon quelques pauvres billets, les sifflets, les injures de quelques
imbéciles… ou une grosse cornada ?
« Y me toco, me toco perdeee ! Y me toco me toco
lloooora ! »
Sur la route qui file vers Utrera, tout le monde est
triste, dans le fourgon. Même Manolo Corona, d’habitude si enjoué,
toujours torero… Hier, on a tout perdu : La corrida est sortie
« impossible »… et le Turronero est mort ! Il avait cinquante neuf ans,
et malgré sa paralysie, il restait un des tout grands du cante flamenco,
du vrai « jondo ».
Hier, « le pobre Manuel « El Turronero », cantaor de
Utrera… perdio ! Et Luis, torero de Utrera.. lloro ! ».
Certains disent que les hommes ne doivent pas pleurer…
Ce sont des c ! Un homme peut pleurer d’amour, de peine ou de rage !
Question de cœur, de tripes et d’émotions !
Sur l’autoroute qui file vers Utrera, les larmes ne
sont pas loin : « Aujourd’hui, on s’est vraiment joué la vie… pour rien,
et Manuel « El Turronero » est mort ! »
On sait que les Fraile ont marqué l’Histoire Taurine de Bayonne.
En fait, ils l’ont marquée « à l’envers », à l’heure où
la Bayonne Taurine était « estancada », où l’émotion était nulle, où
l’électrocardiogramme aficionado était plat. Une première corrida « mit
le feu », en 84 et certains en firent logiquement des « gorges
chaudes ». Hélas, lors des années suivantes, on « avala tout » sous
prétexte que les Fraile étaient « différents » et qu’avec eux
« l’émotion » était toujours présente, même si elle était… malsaine.
Alors on se mit à tout mélanger, aveuglément, faisant passer du genio
pour de la caste ; de la violence et du sentido pour de la bravoure. Le
« Sud Ouest » lui-même ne titra t’il pas un jour, juste au-dessus du
cliché d’un Fraile qui sautait au callejon « Ah, le toro brave !! »
Et tout le monde de s’esbaudir !
Et tout le monde d’applaudir !
Et tout le monde de se lever, « pouce en bas ! » comme
aux jeux du cirque, dans l’antique Rome…Una verguenza !
C’est un peu ce que l’on a ressenti, hier, quand
certains « aficionados » ont ovationné l’arrastre du premier Fraile, « una
prenda » qui avait gravement blessé Denis Loré et littéralement
« épuisé » Lopez Chaves. Certes, le toro avait fait illusion dans le
premier puyazo, poussant avec fijeza, mais ensuite… por favor !
Le reste de la corrida fut « à l’avenant », les applaudissements au
ganado se succédant, avec cependant chaque fois moins de force lorsque
l’on arrastrait les toros. A la fin peut-être, tout à la fin… on se
rendit compte que l’on avait vu une moruchada, une mansada, et une autre
« chose », commençant par « m » !
Oh bien sûr, il y avait des cornes, solides et
astifinas. Mais les cornes seules ne font pas le trapio !
Bien sûr il y avait « force et rage »… qui n’ont jamais
fait « la caste ».
Bien sûr il y eut « la mobilité », mais toujours liée à
des trajectoires « en demie courbe », à des retours « en hameçon », à
des arrêts « tordus » en plein muletazo… A ce jeu-là, le premier, du
nom de « Macarron » fut le roi (Il aurait mieux porté le nom de « Macarra » !),
immédiatement suivi du cinquième, « Roncador », ronflant sa traitrise
par tous les naseaux. Le sixième ne fut pas mal non plus, côté « regards
en dessous, bien torves ! »
Et puis, il y eut « Cardon », le premier « officiel »
de Lopez Chaves, que l’on sortit en troisième, afin de laisser se
reposer le torero, après le « trance » qui suivit la blessure du
Français.
Le toro ne payait pas de mine, mais il eut « deux
qualités » : De la mobilité un peu « plus droite » que les autres, et
surtout « la chance » de trouver face à lui, un torero qui « resta là »,
esquiva se premiers mauvais coups à droite, et lui fit avaler, l’une
après l’autre, trois séries de naturelles « gonflées », de plus en plus
« limpias », de plus en plus dominatrices, au point de même revenir à
droite, histoire de montrer que le fauve était « à peu près » dompté.
Formidable engagement d’un Domingo Lopez Chaves qui,
sur ce coup là, cent fois plus méritoire et « plus vrai » que l’autre
jour à Bilbao, mérite tous les éloges. Certes, ce ne fut pas une faena
« de dentelle », mais après un estoconazo entier « de los valientes »,
les deux oreilles étaient de rigueur. Alli estuvo « muy en torero »
Domingo Lopez Chaves.
Pour le reste… il fallut se défendre et se cantonner à des « exploits »
individuels, à des éclairs fugitifs. A ce titre, on saluera « El Javi »,
banderillero du Salmantino, qui posa deux paires de banderilles au
cinquième… pour le souvenir. Les picadors, eux-aussi, eurent à faire à
une mer souvent « force huit ».
Triste souvenir « d’une sale après midi » de fausse
caste et de vrais mensonges, où la chance, encore une fois, a refusé de
sourire à Denis Loré. Encore une fois... dans le Sud-Ouest. Habitué aux
coups de la vie et des toros, le Français ne s’est pas plaint et s’est
comporté en torero, durant sa brève présence dans le ruedo Bayonnais.
Mais cette fois encore « Le toco, le toco perdeee ! » et nous… « nos
toco, nos toco lloooooraaa ! »
Que te pongas bueno, Denis, et que l’on puisse te
revoir bientôt par ici, avec des vrais toros… et des vrais
aficionados ! Que te quedé la ilusion torera !»
1er Septembre – BAYONNE – 1ère
corrida de la Feria dite « de l’Atlantique » - Deux tiers de plaza
environ – Ciel gris, entoldao et un peu de vent :
Six toros de Juan Luis Fraile, inégaux de poids, de
trapios, et certains vraiment très laids. Par contre, tous très armés et
« puissamment astifinos ». Au moral : Pouah ! Certes de la mobilité,
mais teintée de violence et de sentido. Des charges fortes, en
« s’appuyant » immédiatement sur les hommes, les mettant en danger et
les obligeant à rompre. De ce lot de Fraile, qu’on espère « le dernier à
Bayonne », on retiendra le troisième, qui alla « a mas », grâce au
torero ; et le mastodonte quatrième, qui aurait pu donner, s’il n’avait
été trop durement chatié. Pour le reste, charges en crochets et têtes
chercheuses, avec « au hit parade » : 1er, 5ème
(les champions toute catégorie) et le 6ème, qui « regardait
sourdement ». Pouah ! |
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Les premiers tiers furent très animés, le toro
d'ouverture donnant illusion de bravoure, au point que l’on exigea de
Loré qu’il le laissât au centre, comme l’on fait des vrais braves… Le
toro « y alla », pour un châtiment nul… et c’est le torero qui « paya la
note », aussitôt. Il y eut d’autres moments, où « l’Aficion » ne comprit
pas toujours que « ces toros là », il faut les piquer, les lidier « sur
les jambes », les mettre en place… y matarlos !
Les poids, dans l’ordre de lidia : 482, 504, 502, 623,
511, 531 kgs.
Denis Loré : Cornada grave, en début de faena –
Reçut proprement le premier, très armé, et le mit en place. Après le
premier puyazo poussé "a mas", un quite par faroles inversés, risqué.
Une partie du public, plus « éclairée » que les professionnels, lui
demanda de laisser le toro charger « depuis le centre », et fit arrêter
le castigo, d’autant que le toro n’avait pas tenu ses promesses. Ce fut
une erreur, Loré se retrouvant, dès le premier muletazo, avec un toro
affichant beaucoup de sentido et encore plus de violence. Le torero fit
quelques passes par en bas, quelques pas vers le centre, et la cornada
arriva d’un coup sec, Loré étant enlevé par la cuisse droite, le corps
montant, tournant autour du piton et tombant au sol où le toro le
chercha encore. La cornada était certaine et le blessé fut évacué très
rapidement. Quelques minutes plus tard, l’équipe chirurgicale du docteur
Gouffrant était intervenue, avec le professionnalisme que l’on sait, et
le diestro était évacué sur la clinique Paulmy. Au bilan : Cornada
grave, à double trajectoire de 15 et 25 cms, qui ne saigne pas beaucoup,
ne touche aucun vaisseau principal, mais fait de gros dégâts
musculaires.
Pendant ce temps, le toro est seul dans le ruedo, la
corne droite ensanglantée. Domingo Lopez Chaves va prendre la suite,
réussissant à éviter de gros « arreones » pleins de furieuse traitrise.
Le Salmantino tua comme il le put, et sua « la gota gorda » au
descabello. Denis Loré hors de combat, on décida « d’inverser l’ordre
des deux toros suivants, pour laisser reposer Lopez Chaves.
Domingo Lopez Chaves : Deux oreilles et
« Petite » division – A remporté un triomphe « de vaillant » et « de
torero », face au troisième de la soirée, du nom de « Cardon ». Il le
doit aussi à une troisième puyazo, très appuyé, de son picador Miguel
Angel Herrero, tandis que le public grondait.
Ce toro arriva à la muleta, hyper dangereux à droite,
comme put immédiatement le vérifier le diestro. Muleta main gauche,
Lopez Chaves « essaya », réussissant « à faire avaler » une, puis deux
« semblants de naturelles » au malandrin. Le torero alors « se planta »
sur le sable, et tira trois autres passes gauchères, à mi hauteur, plus
rondes, plus ralenties, plus liées…que le toro « avala mieux ». La
deuxième série, toujours aussi décidée, vit le toro prendre mieux la
muleta, Lopez Chaves se libérant d’un grand pecho. Ovation de surprise
et d’encouragement, dans les gradins. La troisième série gauchère fut
liée, ralentie, insoupçonnée et le pecho qui suivit fut salué de vrais
clameurs. Y olé el valiente ! Et vaillant il le fut encore, le jeune
Salmantino, en revenant sur la corne droite, et en s’y imposant
également, avec force et grand courage. Le public « explosa » fort
logiquement, exigeant les deux oreilles, après un coup d’épée entier,
porté avec plus de foi que de style, qui culbuta le toro en une mort
spectaculaire. Gros triomphe, mérité, et gros « trago » passé par le
torero.
Devant le cinquième, « a defenderse !» : Le toro était
armé de deux missiles que Lopez Chaves réussit à éviter. Après un vilain
pinchazo, un bajonazo « qui fera date », mais que l’on pardonne, car il
fallait se défendre.
Luis Vilches : Silence au trois, après « des
passages sifflés », à ses trois – Que peut faire « un styliste » devant
de telles « choses » ? – Se défendre ; « essayer » en sachant déjà que
l’on ne pourra s’exprimer ; et « en finir », le plus vite, le plus
proprement possible.
Vilches « essaya », fit beaucoup de passes, cria un
peu, persuadé que « c’était perdu d’avance ». Il tua son premier d’un
bajonazo infâme, accidentel, et fut plus « correct » ensuite, même si le
dernier lui fit grand peur, au moment de l’épée. Peut-être le quatrième
lui aurait permis une autre faena, s’il avait été moins piqué, mais…
« 623 kgs et des cornes « asi !», vu ce qui était sorti avant…
Echec donc, de Luis Vilches, que l’on pouvait deviner…
dès la lecture des cartels. Hier encore… on a « un peu plus » détruit un
bon torero !
Ce soir, la corrida
débute à 18 Heures :
Toros de Charro de Llen, pour Juan Bautista, Jose Maria
Manzanares et Miguel Angel Perera
ATTENTION ! Demain Dimanche, le paseo sera à 17h30.
Qu’on se le dise !
Toros de Garcigrande, pour Morante de La Puebla, El
Juli et Sébastien Castella.
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