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MONT-DE-MARSAN :
QUAND PADILLA SAUVE VICTORINO…
Excellente présentation de Javier Valverde
26 Juillet : La corrida de clôture de la Madeleine 2002 aurait pu être
un fracaso retentissant. Un torero l’a sauvée… Juste retour des
choses !
Après les apothéoses auxquelles nous étions
(trop mal) habitués, il fallait bien que cela arrivre un jour…
Cela fait cinq ans que la Victorinade « sauvait »,
en partie, la Feria de Mont de Marsan. Cette fois, elle a failli
l’engloutir. Adieu l’admiration, l’émotion, le rythme, l’intensité
des « versions passées »… Cette année, on peut se demander
quelles auraient été les réactions du public si les toros sortis hier,
avaient porté, par exemple, la devise d’un Jose Luis Marca ou d’un
quelconque Domecq… « Pues, queman la plaza ! » |
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La corrida est sortie, basse, réduite, faible et
endormie au cheval. La corrida est sortie, mobile certes, mais bourrée de
défauts, « regardant » beaucoup, « marchant »
beaucoup, se retournant beaucoup et vite… Si on ne nous croit pas,
qu’on interroge Fernandez Meca, qui a du passer un des plus mauvais
moments de sa carrière… Qu’on en parle a Javier Valverde, face à son
premier.
Hier, à Mont de Marsan, Victorino aura eu du mal
à revendiquer une quelconque place de Numéro Un au ranking ganadero.
Ces toros sont « différents »,
certes, mais la corrida d’hier, même dans sa « différence »
fut pour beaucoup une immense déception, de par sa présentation, et par
le jeu « qu’elle n’a pas donné », en particulier au
premier tiers...
Heureusement, un homme a,
en partie, gommé ce lapsus. Dieu sait qu’il n’est, ni un grand
classique, ni un grand technicien, ni un artiste de haute inspiration.
Dieu sait qu’il n’est pas torero de notre dévotion… Mais il faut
bien reconnaître que la décision, l’abattage, la puissance et une
certaine sincérité, ont fait de Juan Jose Padilla l’indéniable
triomphateur de la corrida… et de la feria. Quatre oreilles, dont une,
fort discutable, sont là pour en témoigner, tout comme les visages en
joie, dans les gradins… et dans le callejon.
Alors, ne boudons pas le plaisir de la majorité…
Hier, à Mont de Marsan, le public a préféré rugir de plaisir, plutôt
que de gronder sa colère. C’est bien ainsi !
Juan Jose Padilla, pueblerino presque détestable
devant son minuscule premier, mais « se sauvant » par une
impressionnante cogida au moment de l’épée, a surpris beaucoup de
monde en ralentissant son toreo, face au noble cinquième, et en portant
une estocade digne des « canons de Navarone », avant que ne
passe Grégory Peck et sa bande de dynamiteurs... Quatre oreilles, c’est
beaucoup, mais c’est bien peu, à côté de l’énergie dépensée par
le Jerezano.
A ses côtés, plus calme,
plus classique mais tout aussi décidé, Javier Valverde. Le jeune
Salmantino vient de prendre l’alternative. Il se présentait en France,
de matador de toros, et prenait de Victorinos, pour la première fois. On
peut dire que sa sortie est des plus positives, de par le sérieux, la
fermeté et le talents déployés. Passer derrière « le Typhon
Padilla » et « faire dans la sobriété », deux minutes
après l’immense orgie…, cela ne manque pas de
mérite, que le public sut lui reconnaître.
Au palco, la Victorino
Martin Family ne disait rien… mais, peut-être pensait elle que, pour
une fois, un torero lui avait fait le quite…et qu’il faudrait « rectifier
le tir », l’an prochain ! Cependant, « les choses étant
ce qu’elles sont… », il n’en manquera pas pour dire que nous
avons vu « une grande Victorinade » ! Bueno ! Chacun
voyant dans la corrida ce qu’il va y chercher, nous respecterons cet
avis. C’est aussi pour cela…que nous sommes Aficionados !
25 Juillet – MONT DE
MARSAN – 5ème et dernière de La Madeleine – Llenazo
– Temps gris et lourd.
Corrida de Victorino Martin : Basse,
de profil ; Fine, de face, « se cachant » derrière des
armures sérieuses, sans exagération. Corrida qui est sortie mobile,
correosa, avec tendance à la distraction et la fuite (le deuxième sauta
au callejon et deux autres y regardèrent beaucoup). A part le cinquième,
les toros furent difficiles à fixer aux capotes. A la pique, même
s’ils furent mis plusieurs fois, et de loin, au cheval, on dut les
« protéger », car ils eurent tendance à faiblir et
s’endormir sous le fer. « Descafeinados », au premier tiers.
A la muleta, un toro noblisimo : le cinquième. Un terrible et
dangereux : le quatrième. Entre ces deux extrêmes, des charges qui
se raccourcissent, des retours secs, des regards lourds de menace. En un
mot : petits, souvent vicieux, maintenant l’inquiétude de tous. En
un mot… une corrida des plus incommode pour les toreros.
Stéphane Fernandez Meca (Silence –
Division) ne fut jamais « a gusto ». Son premier est faible au
cheval, court à la muleta. Meca essaie de la passer des deux côtés,
sortant avec difficulté de chaque série. A un moment, on croit qu’il
va y arriver, sur main gauche… mais un upercut du toro le fait renoncer.
Deux pinchazos et une entière suivie d’un descabello.
Le quatrième est un danger ambulant. Una caja de
bombas ! Endormi à la pique, ce toro va se mettre à marcher,
marcher, le regard « directement dans les yeux du matador »…
Celui-ci va aguanter deux charges, puis se faire totalement déborder,
accentuant les défauts du toro, finissant en panique. Et on peut le
comprendre ! Epée "de gendarme", sortant de cinquante
centimètres, sur le côté ; un pinchazo, très compromis, et
l’entière libératrice. Fernandez Meca s’est fait très peur… Et à
nous donc !
Juan Jose Padilla (Deux oreilles – Deux
oreilles) a connu une apothéose que personne ne pourra lui discuter,
quant à l’intensité. Que les récompenses attribuées soient justes ou
non, passe à l’arrière plan. Le public a récompensé l’abattage,
l’énergie et la grande bonne volonté du Jerezano, tant à la cape
qu’aux banderilles, tant à la muleta qu’avec l’épée.
Son premier est un moustique, cardeno muy claro,
qui galopa dans tous les sens. Padilla le toréa bien à la cape, le
banderilla en puissance, terminant par une paire « al violin ».
La faena comportera plusieurs séries de droitières très liées, clôturées
de vibrants double pechos. Puis, ce sera une débauche de diverses
vulgarités, qui mirent la plaza en ébullition. Entrant court, le grand
Padilla « tombe » littéralement sur le petit toro, qui le
prend au niveau du ventre et le lève haut, dans un furieux dernier
hachazo. Le costume déchiré, tordu de douleur, grimaçant
d’importance, Padilla lutte pour ne pas être emporté vers
l’infirmerie… Le toro tombe et la plaza explose, d’émotion et de
joie. Une oreille, immédiate, le président résistant un moment, mais
devant abandonner ses prérogatives et lâchant la deuxième oreille, sous
peine de se faire écharper par la masse « vociférante ».
Padilla donna une vuelta d’apothéose et fila à l’infirmerie, dont il
revint, le costume dûment « strappé Velpeau »!
Par contre, son actuacion au cinquième est complète,
digne d’éloges. Bien au capote, avec des véroniques ralenties, à
droite. Enorme de puissance et de vista, aux banderilles, en particulier
dans un «violin » parfait. Surprenant, à la muleta, dans une faena
beaucoup plus sérieuse, plus posée, que le première, tirant deux séries
de naturelles amples, ralenties, parfaitement liées à de grands pechos.
Ce n’est pas du Paula, mais… Pour en finir, un monumental coup d’épée,
dont le toro sort moribond. Deux oreilles incontestables et une vuelta
d’enfer, le sympathique jerezano doublant le tour d’honneur, dans
l’allégresse générale. Rien à dire, sinon que le toro fut très
noble, et que le torero sut se hisser à son niveau. Bravo !
Javier Valverde (Ovation – Une oreille)
a remporté un sacré challenge : Un mois et demi après son
alternative, de présenter en France, dans une grosse feria, en
remplacement de Ferrera, et face à des Victorino Martin ! Monterazo !
Son premier était bas, armé fin. Le salmantino,
très calme, très ferme, le fixa par lances « génuflexés »,
avant de donner les trois grandes véroniques de la journée. Le bicho
prend trois piques qui ne disent rien, et arrive sans grand jus, à la
muleta. Valverde, très décidé, va essayer d’allonger cette charge,
mais essuyer plusieurs retours très secs, dans les remates de chaque série.
On a quelque espoir sur les premières passes de gauche, mais le toro va
également fermer la porte, de ce côté là. Valverde essaie à nouveau,
mais se fait longuement enlever et bringuebaler au dessus des cornes. Sans
mal, heureusement. Une presque demie épée, en arrière et de côté, qui
ne fait pas son effet, et une épée contraire. Ovation que libère un
descabello. Estuvo en torero !
Le sixième sera peut être trop piqué.
Qui le sait ? Valverde va démontrer, face à ce toro noble, mais qui
ne dura pas longtemps, toute la sobriété, la fermeté et la personnalité
de son toreo. Il y a du Viti, là-dedans. Une grande série de derechazos
fut le sommet d’un trasteo sans aucune concession à la galerie, hormis
trois pechos enchaînés. Tuant rapidement, Javier Valverde coupa une
oreille de justice et de raison. Une oreille qui doit lui servir à gagner
des contrats et des postes dans l’escalafon. En tous cas, le jeune
torero de Salamanca a gagné le respect de l’Aficion du Sud Ouest, qui
le reverra avec plaisir.
Final de la feria 2002. Ce
fut long, parfois un peu poussif. Mais la sortie, radieuse, de Padilla,
ovationné par la foule, debout, en restera l’image première. Après
tant de coups reçus, tant de cicatrices « inoubliées », le
Jerezano méritait bien cela. Viva !
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