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MANOLO
CABALLERO GAGNE « LE PARI BAYONNAIS »
L’albaceteño, en grand torero, toute la tarde.
16 Août : Il est arrivé aux arènes, très concentré, loin de ce
Caballero jovial, plaisantin, un peu « pasota » que l’on
voit quelquefois, dans les « petites » occasions. Manolo
Caballero savait l’importance de ce double challenge : Celui de
Bayonne, et le sien.
A
Bayonne, certains râlaient franchement, d’autres haussaient les épaules,
abattus ; les derniers levaient les sourcils et disaient :
« Attendons ! » Et nous en étions.
On sait que Manolo Caballero n’est pas torero
de notre dévotion… sauf quand il se trouve face à un toro devant
lequel il doit démontrer son « poder ». Voir Manuel Caballero
faire le dandy devant des chèvres rampantes a de quoi « se couper
le coleta ». Par contre, lorsqu’il y a de la race, de la force, et
qu’il faut vaincre par la technique et la fermeté, alors Caballero est
aux premiers rangs. La corrida d’hier était pour lui, celle de tous les
dangers. La presse espagnole et le mundillo étaient aux aguets. Certes,
il avait gracié un toro au Puerto, dimanche, certes, il avait coupé une
grosse oreille, à San Sebastian, mais beaucoup disaient qu’il avait
« laissé passer » un grand toro de Javier Perez Tabernero. Et
hier, à Bayonne, il en avait six, face à lui. Par ailleurs, beaucoup
commentaient le manque de « registre artistique de l’Albaceteño » :
trop court pour maintenir l’intérêt du public, et aller « à mas »,
sur six toros. Toutes ces questions avaient de quoi faire gamberger le
plus insouciant et Caballero pouvait se montrer « un peu tendu ».
« Pouvoir, avec six toros ! », aucun doute la dessus. La
question était de savoir : Comment ?
Pour l’organisation
Bayonnaise, c’était également un gros pari. Il y avait « la
pression locale » et certaines déclarations imprudentes d’avant
saison, quant à d’éventuels remplacements. Il y avait la nécéssité
de maintenir le niveau du cartel décapité par l’absence de Ponce, et
le retrait forcé de Barrera, qui se remet difficilement de la cornada de
Barcelone. Monter un cartel « de grande classe », comme il
sied à cette plaza, un 15 Août où tout le monde torée ou presque, était
un gros challenge. D’où le choix de « l’événement ».
Un dur pari ! Un gros challenge ! Une corrida de six toros pour
un seul diestro peut être « muy pesada ». Alors, Caballero,
avec six, dans une plaza où plus de 50% du public est « touriste,
ou tout comme », on pouvait se poser quelques questions…
La réponse est éclatante :
Manolo Caballero, très concentré, très sérieux, et très torero, a
pris les six toros de Javier Perez Tabernero, une corrida très sérieuse
en tous domaines, et a triomphé, de façon incontestable. Peu importent
les cinq oreilles, dont trois nous semblent seulement justifiées. Seule
importe « la façon » ! Et, même s’il avait fracassé
à l’épée, perdu tous les trophées au descabello, en un mot, « même
s’il n’avait rien coupé », nous soutiendrions que Manolo
Caballero a été « Enorme » de sérieux et de toreria, hier,
15 Août 2002, en plaza de Bayonne.
Le plus beau est que tout le monde s’en est
aperçu. Même le public a eu du talent! A preuve, l’ovation formidable,
lorsque Caballero s’en vint au centre, brinder à tous le dernier toro.
Une ovation d’admiration et de totale reconnaissance. Une ovation qui
disait : « Chapeau, monsieur ! »
Pas un instant d’ennui ! Pas un moment de
doute : le torero donnait des ordres, rassuraient ses gens, faisant
preuve d’un calme total, même quand les toros lui mirent deux terribles
coladas, d’entrée de jeu. Caballero fut très bon, au capote, plaçant
des quites discrets, mais impeccables, par chicuelinas ou tafalleras. A
garder dans la mémoire, ses débuts de faenas, soit par le haut, soit par
doblones, efficaces et élégants, très calmes. Dans le toreo
fondamental, il n’abusa pas « des séries sans fin ». Il toréa
toujours « juste », jouant sobriété et qualité. Muy bien !
A l’épée, toujours tendido et trasero… mais il tua très bien le
troisième, et le dernier, d’un recibir « a un tiempo ».
Seules petites concessions au public… un petit
geste coquin pour demander à la présidence « alors, il n’y a pas
de musique ? ». Et
la faena au dernier où, ne pouvant totalement convaincre dans le
fondamental, et devant à tout prix couper les trophées, Manolo Caballero
fit un peu monter la pression par des enchaînements inversés, un peu
brouillons, un peu électriques. On lui pardonne bien volontiers.
Encore une fois, le torero d’Albacete a été
« vraiment bien », et tout le monde en est très heureux.
15 Août – BAYONNE –
Plaza llena – Temps ensoleillé, très agréable :
Six toros de Javier Perez Tabernero, de présentation
inégale, mais tous sérieux, soient par leur gabarit et hauteur, soit par
les cornes qui « compensaient » une corpulence plus réduite.
Au moral, du sérieux et de la race, à plusieurs reprises. Corrida
importante, quatre toros « rompant a bueno », parce que le
torero avait fait les choses correctement. Au cheval, ils poussèrent inégalement,
le quatrième seul se déclarant manso. Grand tiers de piques du dernier
qui poussa longuement et fort. Seul le quatrième, manso, andarin, court
et « cabécéant », ne permettait rien. Au contraire, les 2, 3
et 6èmes permirent le toreo sérieux, répétant avec noblesse et force.
Impeccablement vêtu de bleu roi et or, Manuel
Caballero prit les six, sans tension, sans cette grande tâche de sueur
qui change souvent la couleur du traje, au creux des reins… Pourtant,
Dieu sait que l’effort fut intense et soutenu. Il se montra
remarquable, au capote, toute la tarde, recevant les toros par d’amples
véroniques, remarquablement rematées. A la muleta, rigueur, parsemée
d’adornos du meilleur goût, sans décomposer le figure, ni entrer
« dans le registre d’un autre ». |
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Premier toro tardo, hésitant, court. Caballero
tue d’un pinchazo hondo tendido, mais a déjà démontré qu’il vient,
très concentre, très décidé. Ovation
Le deuxième lui met une méchante colada, sur la
première passe de cape. Caballero le reprit et le dompta, montrant qui était
le patron. Faena très torera, avec une première série droitière, de
grande classe. Final par un superbe tres en uno et une épée trasera un
poil de côté. Une oreille, très méritée.
Le troisième n’a pas la même classe. Très
remuant au capote, il permettra au diestro de montrer son poder et sa
technique. Faena de torero complet, sérieux et professionnel. Bonne
estocade et descabello. Deux oreilles, un peu surprenantes, la deuxième
étant respectueusement protestée.
Le quatrième est le mauvais garçon, manso qui
marche et cherche le sale coup. Caballero le démontra en de brefs essais
sur les deux côtés, et s’en défit, dans la compréhension quasi générale.
Silence.
Le cinquième est un toro très armé, très sérieux,
qui met une terrible colada au diestro, sur la première passe de cape.
Caballero est obligé de tout lâcher et sauter au callejon. Bonne
intervention du Niño de Belen. Ce toro était il vraiment dangereux ?
Peut-être. Difficile, certainement. Caballero l’entreprit avec calme et
courage, mais ne réussit pas à trouver la solution, à gauche. Dans le
callejon, certain ganadero salmantino soutenait que « là était la
solution ». Grande ovation après avoir un peu coincé avec
l’acier.
Manolo Caballero « devait », à tout
prix, couper les oreilles du dernier, un toro sérieux, très armé,
brillant au premier tiers, et venant de loin, à la muleta. On attendait
une grande faena, et l’ovation au brindis général soulignait ce désir.
Ce ne fut pas une grande faena ! Pourtant, elle débuta par quatre
passes de grande classe, doblandose con el toro. Après une première
partie sérieuse et très torera, Manolo Caballero « préféra
assurer » en prenant le toro par muletazos inversés, qui chauffèrent
les gradins. On aurait préféré des cites à quinze mètres, auxquels le
toro aurait sûrement répondu. Final spectaculaire et un recibir,
rapidement préparé et éxécuté », qui libèrent l’enthousiasme
général, avec deux oreilles, logiquement généreuses.
Grand triomphe, belle
salida « a hombros », et « double pari » remporté :
« celui » de Bayonne, et « celui » de Manolo
Caballero. Todo bien ! Enhorabuena !
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