« VOILA
POURQUOI NOUS SOMMES TOUJOURS AFICIONADOS ! »
27 Juillet 2001 – Bis repetita ! Souvenez-vous, l’an passé, ce
cri (« Voilà pourquoi nous sommes aficionados !») nous échappait
dans la chronique qui tentait de conter l’émotion d’une grande,
d’une immense tarde de toros : la Victorinada 2000, en plaza de
Mont de Marsan.( Si le souvenir vous échappe, allez à « Temporada
2000 – actualité – 20 Juillet).
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Aujourd’hui... bis repetita ! La corrida
de Victorino Martin, trois matadors et leurs cuadrillas ont sauvé la
Feria de la Madeleine 2001, le tout, télévisé en direct pour toute l’Aficion
Espagnole.
C’est une joie immense d’avoir vu sortir les
six Victorino, fiers, en véritables toros de combat. C’est une joie
immense d’avoir vu un Stéphane Fernandez Meca, impérial, devant un
grand, un formidable toro, à qui on ne donna « que » la
vuelta. Le recibir est tombé bas.. Una lastima ! mais le coeur du
torero partait « dans tout le haut »...
C’est une joie immense d’avoir vu en Zotoluco,
un torero intègre, vaillantissime et loin d’être maladroit, signer sa
véritable « entrée » en France. C’est aussi une grande
joie de vivre l’effort et la victoire finale du Tato, signée d’un énorme
volapié. On se souviendra longtemps, également, d’Efren Acosta et de
sa toreria a caballo. De même « El Chano », pour deux grandes
paires de banderilles .
Apothéose finale pour Stéphane Fernandez Meca,
impeccablement vêtu, torerisimo toute la tarde. Apothéose pour le
mayoral de Victorino, remplaçant le vieux Julio. « Ay
Julio ! te habra gustado ! »
Reste une petite question ! Que se serait il
passé si on avait donné au cinquième toro la chance d’un grand tercio
de piques ? Que se serait il passé si les banderilleros avaient su
garder le toro au burladero d’en face, pendant que le piquero gagnait sa
place ? Que se serait il passé si, malgré une première
intervention du Zotoluco, le toro n’était pas parti se fracasser dans
le piquero, appuyé en tablas, défendant d’abord son cheval, puis
donnant un très lourd puyazo, à la porte « des caballos » ?
Que se serait il passé si le Chano n’avait pas, encore une fois, laissé
échapper le toro, pour permettre à Meca de mettre, « réellement »
en suerte ce toro pour trois vraies piques ? On ne le saura jamais...
mais, peut-être aujourd’hui parlerions-nous d’un indulto... d’un
toro grâcié, en plaza de Mont de Marsan... D’ailleurs, regardez bien
dans les images qui emplissent votre mémoire... En fin de faena, Stéphane
a un geste.. « Faut il que je le tue ? » Bien
entendu, s’il peut éviter le moment de l’estocade, un torero ne va
pas hésiter à être « un poil » démago ! Mais là...
Meca avait tellement brillé, et avec lui « le Gargantilllo »,
qu’on peut le croire totalement sincère : S’il avait eu la
chance d’un « vrai grand tercio de piques », on parlerait sûrement
d’un indulto, en direct à la télé, depuis Mont de Marsan... « Si,
si, si.. avec des si... Bien sûr !
La plaza a explosé... « Plus de ministre,
plus de député, solo Aficionados ! ». Seulement des hommes et
des femmes qui ont vibré, ensemble, « a la grandeza de la Fiesta
Brava ». La corrida était télévisée, on l’a dit. Chez lui, là
bas, au fond de l’Andalousie, le vieil aficionado d’hier (voir edito
du 26 juillet) s’est levé, a donné trois naturelles de rêve, avec le
napperon de la table du salon, et sa femme, prudemment, à murmuré un
timide « olé ! », de derrière sa table à repasser...
Todos Aficionados ! Oui vraiment, « voilà pourquoi nous sommes
« toujours » Aficionados ! »
26
Juillet – Mont de Marsan – Cinquième et dernière corrida de la
Madeleine 2001 – Lleno impressionnant – Têtes connues au palco
d’honneur, « como tiene que ser »!- Chaleur lourde au début,
totalement oubliée par la suite...
Six toros de Victorino Martin, magnifiquement présentés
et armés. Fins, sans excès de poids, sortant comme des furies, montant
haut dans les premiers capotazos, pour ensuite se fixer dans les capes et
les suivre comme des chats une balle qui s’enfuit. Tous, bien sûr
n’eurent pas un comportement de noble, de brave. Mais la corrida sera,
de bout en bout, passionnante, de par le comportement des toros, de par la
toreria des hommes.
On dira que le lot du Zotoluco fut très dur, très
violent ; Que Stéphane Fernandez Meca sut exploiter le bon côté
gauche de son premier, et se hissa à la hauteur de la grande et puissante
noblesse du fameux cinquième. Le Tato, quant à lui, toucha un premier
toro qui répétait, mi soso, mi avisé, devant lequel il subit un
échec muletero, puis acier en main. Par contre, le sixième, autre grand
toro, lui permit un joli desquite, signé d’un énorme volapié.
Eulalio Lopez « El Zotoluco » a signé
une tarde d’immense honnêteté, de courage et de savoir mêlée. Bien
en recevant de cape le premier, guapisimo, qui va lui sauter au visage. Le
toro s’endort un peu à la pique, prenant deux autres puyazos, légers.
Le Victorino arrivera très violent et court, à la muleta du mexicain qui
fera face, avec calme et courage. Doblones bien appuyés, « toques
de verdad », aguante dans les passes des deux côtés, évitant les
coups de hachoirs, et revenant au combat, jusqu’à pouvoir lier
plusieurs muletazos très vibrants. L’oreille pointait à l’horizon de
cette première faena, mais deux pinchazos, une entière et un descabello
ne vont permettre qu’une énorme ovation, accompagnée d’un avis,
tandis que le toro était arrastré sous les bravos – Le quatrième,
magnifique, donnera lieu à un grand tiers de piques, mesuré, calibré,
sculpté par cet immense picador qu’est Efren Acosta. Trois piques, citées
de loin, le fer montant haut, et tombant, net, sur le morillo du toro. Le
châtiment est dosé, d’une poigne de fer, tandis que l’autre main
manoeuvre le cheval. Trois puyazos « à tour complet », le
picador manoeuvrant pour libérer la charge du toro. Rien à voir avec la
carioca. Le public ne s’y trompa en rien, qui fit
une immense ovation au géant cavalier (dans tous les sens du
terme). Hélas, le toro va
tourner « court » et « serré ». Le Zotoluco,
malgré ses efforts, ne pourra lui inventer une charge.Ovation pour le
matador mexicain, qui tue d’une entière ladeada, très vaillamment
poussée, et deux descabellos. On le vit très attentif
à la lidia, et le public lui applaudira un quite au sixième, clos
d’une jolie demie véronique. « Muy
torero, Señor ! »
Enorme et définitif triomphe de Stéphane
Fernandez Meca. Le public l’a constaté, euphorique, et la télévision
espagnole l’a envoyé au plus profond de la planète taurine. Deux
oreilles et sortie a hombros totalement méritées. Il y aurait eu trois
oreilles et une queue, « c’était pareil !» Il
ne suffisait que deux choses : Une épée à son premier, au lieu des
trois pinchazos.. et le recibir moins bas, au cinquième. Mais peu
importe, moralement, les trophées y sont, et le triomphe est total. Le
deuxième Victorino sort comme une torpille dans un immense nuage de
poussière. Vaya ! Il va peser un moment sur Meca, dans les premiers
capotazos, puis soudain se freiner, s’arrêter. Batacazo sur la première
pique, puis deux autres puyazos, longuement cités. Le toro est tardo.
Meca va commencer superbe, devant un toro qui a son degré de « guasa »,
mais un bon piton gauche. Trois séries de naturelles, à mas, clos de
pechos gauchers, puis énormes doubles pechos. Grandes ovations. Ce sera
beaucoup moins net à droite, le torero continuant, très engagé. Le toro
tarde beaucoup à déclencher, et Meca ne pourra vraiment l’accrocher,
en fin de faena. Peu importe, le trophée était largement conquis, mais hélas,
l’épée « se refusa » par trois fois, le torero devant même
se protéger d’une dernière oleada du bicho.L’épée définitive sera
vite retirée, le trajet de la lame n’étant pas très conventionnel.
Adieu l’oreille, mais grande ovation pour le Français – Le cinquième
« Gargantillo » sort « guapo » et vient fort dans
le capote de Meca. Tandis que les piqueros font leur entrée, le toro s’échappe
des peones, au burladero d’en face, traverse la piste au galop,
direction «les cavaliers », mais se voit détourné au dernier
moment par le Zotoluco, adroit, précis et courageux. Malheureusement, la
maladresse d’un peon le ramènera sur le cheval qu’il ira percuter
violemment, poussant en brave, prenant un lourd puyazo, le cavalier appuyé
aux barrières. Le toro est ramené au burladero d’ombre, tandis que
picadors et toreros regagnent leur place. Hélas, encore une fois,
« Gargantillo » s’échappera de la garde « hésitante »
du banderillero, et fondra sur Fernandez Meca qui le mettra rapidement en
suerte. Très châtié dans la première rencontre, le toro ne prendra
qu’une petit pique ... Que se serait il passé si ce toro avait été
mis trois fois, correctement, en suerte ? Allez donc savoir ! Le
deuxième tiers sera « à la gloire » du Chano, pour deux
grandes paires de banderilles. Il fut le seul à saluer, de toute la feria
(Il y a eu, pourtant, d’autres grandes paires de banderilles,
aujourd’hui, et avant)
La faena de Stéphane Fernandez Meca sera.... un
faenon ! Elle débute en se doublant, doucement mais fermement, vers
le centre. Dès la première série, le Français va « dar de comer al
toro », va lui donner la muleta, loin devant, lier les muletazos et
à nouveau, donner la muleta en pâture à l’ogre qui va suivre et
suivre pour la dévorer. Un faenon, et la fièvre qui monte, au fur et à
mesure des séries. Le corps se redresse, l’attitude se relâche, Meca
devient « grand torero ». Formidable moment de « la
double noblesse » d’un toro et d’un homme. On ne peut décrire
cela. On ne peut que le vivre. « Dois je vraiment l’estoquer »,
questionne Meca, en allant changer l’épée. Pas de réponse claire et
donc, Fernandez Meca prépare soigneusement un recibir, magnifiquement cité,
bravement porté, mais qui, malheureusement tombera très bas, au point
que le matador lui-même retirera la lame, prestement. Adieu, le rabo !
Lent et long cheminement vers la mort, de ce toro qui, enfin s’écroule
en plein centre, tandis que le torero devient « un enfant, le soir
de Noël », et que le public jubile totalement. Mouchoir bleu, après
les deux blancs ! Deux oreilles et vuelta pour « Gargantillo ».
Magnifique... mais on est passé, peut être,
« à côté » de l’Histoire ! Chapeau Victorino !
Monterazo, monsieur Stéphane, impeccablement vêtu de « bleu
porcelaine et argent », souriant radieux sous l’ovation, et prêt
pour d’autre voyages, d’autre contrats, d’autres ovations, là bas,
« de l’autre côté »..
El Tato a subi un gros échec, face à son
premier. Ce toro, ovationné à la sortie, avait pris une première pique,
de « brave », mais était sorti flojo de la troisième
rencontre. Cependant, il était « remonté » au banderilles et
arriva fort à la muleta, répétant des charges un peu sosoas, la tête
à mi hauteur, sans transmettre. Le torero donna dans la quantitié, le
public lui reprochant de rester sur le voyage, de ne pas s’engager, en
un mot, de ne pas le toréer vraiment. Faena longue, fastidieuse, le
diestro ne parvenant à trouver la solution que sur trois muletazos bien
tirés, en fin de trasteo. Gros pinchazo et par la suite, la confiance
totalement envolée, tant avec l'épée que le descabello. Un petit désastre !
Aviso et courte pitada. Mais, « pour la télé », un gros échec !
– L’aragonais, heureusement, se retrouvera devant le bon sixième,
autre excellent toro, sorti à « 100 à l’heure » qu’il reçoit
élégamment de cape. Le toro commencera un peu « andarin »,
mais le Tato saura rectifier le tir, dans une faena allant « à mas »,
sans grande élégance, mais efficace et claire, terminée par trois
muletazos « a gusto », bien relâché. Le Tato, alors, se
profila, et encore une fois , fit total honneur à son surnom artistique,
en portant un énorme coup d’épée. La meilleure estocade, une fois
encore, de la feria . Oreille méritée
et l’abrazo final de tout un peuple taurino, tandis qu’un grand
ganadero dormira mieux, ce soir, et qu’un matador rêvera à d’autres
« Gargantillo »...C’est aussi pour cela, que nous sommes
Aficionados !
Les photos et le bilan de Mont de Marsan vous arriveront bientôt. Mais je
ne voudrais pas terminer cette feria, sans remercier l’accueil qui a été
réservé à la Presse par un service dorénavant, parfaitement rodé, et
surtout, à titre personnel, à la Direction et au personnel de l’Hôtel
« Zanchettin », pour avoir si gentiment collaboré à
l’envoi quotidien de ces chroniques. Gracias mil, y hasta el año que
viene, si Dios quiere ! »
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