DAX : ENRIQUE PONCE, « L’ARTISTE DES
PEINTRES »...
15 août : En se rendant aux arènes,
sur les coups de cinq heures, on croit toujours au Père Noël, cher à
Jean Cau. Justement, son ami Jean Ducasse est là pour nous le rappeler. A
l’entrée du parc, au milieu de la foule disparate et des flonflons de
la Fête, sa caseta a bien résisté
au bruit et à la poussière...
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« Je suis content, dit il,
l’exposition sur « le Campo » marche bien, mais alors,
qu’est ce que je vends comme Ponce... Tout le monde veut du Ponce ! »
« Ca »... c’était hier,
avant le paseo de la quatrième corrida de la feria Dacquoise.Qu’en aura
t’il été, après la corrida,
après une des plus belles faenas, plus harmonieuses, plus artistiques,
qu’ait ici dessinée Enrique Ponce ? Qu’en sera t’il ce soir,
après la deuxième production du Valenciano, devant les toros de Samuel ?
Jean Ducasse n’a plus qu’à « rembobiner
sa mémoire », réviser
ses images et s’installer à nouveau devant son chevalet. Après ce que
l’on a vu , hier, il va encore vendre du « Enrique Ponce »...tout
le monde va lui demander « du Enrique Ponce ». Et c’est très
bien ainsi, puisque l’artiste peintre sait si bien traduire sur la toile
le toreo du Maestro de Chiva.
C’est que... « après ce que
l’on a vu hier », il va falloir ajouter un qualificatif à Enrique
Ponce... « Torero Artista ! ». Et ça, c’est
nouveau... En parlant de lui, on disait toujours « grand
professionnel », histoire « de se faire le quite ! ».
On disait souvent « remarquable technicien », l’air un peu
pincé. On disait aussi « trop facile »... Un peu court, comme
appréciation !
Que doit on dire après la grande
symphonie d’hier ? Simplement ceci : Que si Enrique Ponce
« touche » ce toro, à Séville, en pleine feria, et qu’il
lui donne exactement la même faena, tout le monde sort de la Maestranza
« en toréant » et la presse ne parlera plus que d’Enrique
Ponce, Numero Uno « total », grand torero, immense artiste que
le Duende est venu visiter. On met, respectueusement, de côté, la photo
du desplante de Curro, et à sa place, seul sur l’albero doré, la
muleta pliée sous le bras, à huit mètres du toro, Enrique Ponce, en une
pose torerisima, immortalisée par les plus grnads photographes taurins de
la planète... Pas besoin de photoshop ! pas besoin de retouche !
La photo est parfaite, parce que l’image est grandiose. Une vraie
peinture de Ducasse !
Enrique Ponce a donc écrit une nouvelle
page de son Toreo sur l’albero Dacquois... Pourtant, on était bien mal
parti. La corrida de Zalduendo sortait « pequeñote », se
cachant derrières des armures très correctes. Faibles et soso les deux
premiers... Oooaaaahh ! Tout le monde baillait de concert. La Feria
faisait la sieste. On leva un oeil quand sortit le troisième, mieux fait,
precioso... Bautista réveilla enfin le monde, à la cape. Faena honnête
mais sans génie, close d’une affreuse transperçante accidentelle qui,
jamais, ne doit donner lieu à l’attribution d’une oreille.. jamais !
Faites lui donner vingt vueltas, tout le monde debout ! d’accord...
Une oreille, jamais ! Question de principe. Question
d’un « minimum de sérieux », même si la faena... même
si ce fut un accident... même si, après, l’estocade fut bien portée.
Et puis sortit « Legado », un
castaño, petit, bien fait, armé haut. Un toro d’une remarquable fijeza,
au troisième tiers, parce que lidié « au cordeau » par le
Maestro et sa cuadrilla. Enrique Ponce partit brinder à la plaza, et déjà,
l’attitude du torero était celle de l’inspiration...
« Fue un faenon ! », le
torero se permettant, au côté du fondamental, des pages
d’improvisation esthétique, des chapitres de profondeur artistique, qui
firent d’une grande faena, un moment inoubliable... L’espace d’un
instant, dans un silence de cathédrale, toro et torero se figèrent en
une image qui, d’un seul coup, traduisait la grandeur du Toreo... Tous
les appareils photos crépitèrent d’un seul clic... Ponce, muleta pliée
au bras gauche, citait le toro pour un nouvelle « ronde naturelle ».
Passes de soie, douceur infinie, pechos soupirés... Puis le « tres
en uno », puis les changements de main, puis, puis....
« Fue un faenon ! »
L’estocade, portée à fond, mais un poil atravesadilla, mit du temps à
faire effet... Que se serait il passé, si le toro avait basculé, au
sortir de l’embroque ?
« Apaga y vamonos ! », on parlerait de rabo, et du
« énième » faenon de Ponce, cette année...
Après cela, personne ne pouvait plus «passer
aucune rampe ». Finito, qui d’ailleurs, salua le chef d’oeuvre,
et Jalabert, repartit vers son « soupir torero ». Rien à
faire : « Là où était passé Ponce, le toreo ne repoussait
plus »... du moins, hier, 14 Août 2001,
à Dax
14 août
- Dax – 4ème de Feria – Llenazo – Temps lourd
qui va s’améliorant : Six toros de Zalduendo, de format réduit,
mais bien roulés, pour trois d’entre eux, tapandose, « se cachant »,
derrière des cornes astifinas et résistantes. Au sortir des deux
premiers, on craignait le scandale... Cela s’améliora avec les deux
suivants, les meilleurs du jour. Puis, le moment magique passé, on laissa
sortir les deux derniers... le sixième percutera par deux fois le
burladero, se cassant logiquement un bout de corne. Aux piques, il y eut
de tout, surtout peu de force. Cependant, il y eut un batacazo limpio de
Bonnier, par le troisième. A la muleta, beaucoup de soseria chez le lot
de Finito. Deux toros « en or » : Troisième et le
fabuleux quatrième « Legado », que Ponce immortalisa dans sa
grandeur.
Enrique Ponce écouta le silence, après
avoir règlé, en toréant à mi hauteur, sans le brusquer, le triste
premier moustique, qui s’était assommé sur une double vuelta de
campana. Toro faible, sosisimo... Rien à faire. Capeo réduit au quatrième,
bonne mise en suerte, lidia bien soignée. Le toro est bon, fixe sur les
capes, sur les banderilleros. Il accourt au moindre cite, « con
alegria ». La faena sera longue, rythmée, parfaitement construite
en un crescendo d’émotion artistique, le torero s’envolant « vers
d’autres cieux ». Dieu qu’il paraît facile de toréer... Faenon
« total » et public en joie. Estocade qui met du temps à
faire effet. Un avis résonne, tandis que tombe le brave. Deux oreilles
"totales", indiscutables. Un maestro heureux, digne dans son
triomphe, et un public, encore une fois, enchanté.
Finito de Cordoba toucha les moins bons,
d’accord. Mélange de mansedumbre et de soseria, les deux toros allaient
et venaient, sans rythme, sans sel ni poivre. Finito les poussa, les tira,
voulut allonger leurs charges, au point d’en être disgracieux, forçant
la figure, sans une once de relâché. Mais, malgré cette volonté, le
Finito ne se mit pas en, colère, « no se enfado ! no se
embragueto ! », et ses deux faenas furent oubliées, à peine
terminées. Silence et courte ovation . On fut loin du Finito de
l’an passé, avec les toros de « la ganaderia Marquis de Domecq »
Juan Bautista débuta fort bien face au
joli troisième, avec le capote : Lances con garbo, chicuelinas et
rebolera. Y olé ! Joli quite par navarras et serpentina, après un
gros batacazo, sans mal, heureusement, à Monnier. Faena très propre,
dessinant les séries sur deux mains, avec calme et allure, mais sans
hausser le ton, à part sur quatre muletazos « despatarrados »
que le public fêta, immédiatement. Final en manoletinas et desplantes
polis. Bautista entre à matar et laisse, accidentellement, une affreuse
lame contraire, qui « ressort » de quarante centimètres...
Reprenant l’épée, le Français portera une bonne entière, à peine
desprendida et coupera une oreille qui nous semble contestable, sans
qu’ici ne soient dénigrées, ni la faena, ni l’accidentelle
atravesada, ni la totale honnêteté du torero. Eurent mieux valu deux
grosses vueltas, totalement fêtées – Le sixième sortit fort, et
percuta un premier burladero. Bautista voulut le prendre par véroniques
à genoux, mais pour cela il fallait serrer le toro aux barrières. Sur le
cite des peones, le toro partit une nouvelle fois cartonner dans l’abri
et s’y fit mal, probablement. Jalabert va ouvrir une larga à genoux,
puis se rendre compte que le toro allait peu servir. Malgré un châtiment
réduit, le toro n’offrit que peu de résistance, affchant pourtant une
charge longue, au début, que le torero exploita, citant de loin. Puis, le
souffle, comme la charge, se raccourcirent et la faena traîna un peu en
longueur, Bautista exprimant, pieds joints, les dernières demi arrancadas.
Estocade un peu ladeada, mais en faisant bien la suerte...
Applaudissements, tandis que tout le monde cherchait des yeux « Enrique... »,
que l’on allait sortir à hombros, et que Jean Ducasse filait préparer
ses couleurs...
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