BAYONNE : LE GRAND QUITE DE « JAQUETONCILLO »...
3 septembre : La « Victorino Martin family »
pouvait presque sourire, hier soir, après à la fin d’une corrida
« de haute tension », dont les aficionados et ceux qui l’étaient
moins, sortirent bien fatigués, et les toreros, encore plus.
Victorino pouvait sourire
et bénir le ciel, car un toro, un seul, venait de lui faire « un
quite » magistral, sauvant une après midi détestable pour le
ganadero, l’aficionado de verdad... et ne parlons pas des toreros.
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La corrida est sortie grande, agressive,
mais de même, violente et dangereuse pour certains exemplaires, comme le
lot de Meca, de mala casta, ou faible, sosa, sans se définir, comme le
lot de Ponce et le premier d’Abellan. Danger toujours, et nécessité
absolue de « faire les choses bien ».. Sinon « te la
pega »... Corrida qui, sous un autre fer, aurait mérité de
nombreux sifflets... Corrida qui aurait pu se « mal terminer »
si elle n’avait été sauvée par un magnifique sixième, brave « con
mucha fijeza » à la pique du frère
Soro, et « noblisimo, de dulce » , à la muleta d’Abellan.
Ce toro avait besoin d’un torero artiste. Abellan lui récita cinq séries
de bons muletazos, puis se retourna vers le callejon comme demandant
« Qu’est ce que je pourrais bien lui faire, maintenant ? »,
tandis qu’à cinq mètres, le toro l’attendait et le regardait,
presque « con cariño », comme lui disant : « Relâche
toi, laisse toi aller... tu peux y aller » Mais, sans imagination,
sans « Angel », Abellan continuait... « buen muletazo
va, buen muletazo viene ! » Dans le callejon, on était un
certain nombre à se dire « Bon Dieu, si ce toro « tombe »
sur Ponce ! »
Un grand toro a fait le quite à Victorino...
Un toro « de vuelta al ruedo » qui n’aurait pas
manqué de se donner, s’il y avait eu « un autre final ». Au
lieu de cela... Abellan entra fort avec
l’épée, laissant une grosse entière trasera et tendida qu’il
crut définitive. On le comprend : La faena avait été longue, et le
torero était sûr d’obtenir « au moins une ! ».
Cependant, le toro ne tomba pas, et « se amorcillo », se
ramassa sur lui même, au point de ne plus pouvoir se descabeller... Cela
dura un long moment, que le public n’accepta pas, comme culpabilisant
d’assister au spectacle du toro qui tremble sur ses pattes, lutte pour
le dernier souffle de vie, de force, de race... Le public
qui va à la corrida, mais « veut que le toro tombe vite.. »
commença à siffler le torero, et
ce qui aurait pu être succès d’une logique oreille, se termina en deux
avis et bronca, tandis qu’enfin, dans un ultime tremblement, le brave
toro se couchait à jamais. Attitude détestable d’un public qui, en
d’autres occasions, aurait salué « la lutte finale » d’un
grand toro... Ce qui confirme qu’il y a « grand toro, que quand il y a
grande faena... » et cela n’est pas juste.
Ce n’est pas le tout de faire grande
ovation à Ponce, au point de le faire saluer avant que ne sorte son
premier Victorino... il aurait fallu de même apprécier au plus haut, son
final de faena au triste cinquième, le torero le règlant par un macheteo
par le bas, de piton a piton, un genoux à terre, très technique et très
élégant, en un mot très torero, terminant par un desplante « tocandole
el piton », comme pour dire « J’ai pu, avec cette carne. Je
n’ai pu le toréer comme on le fait aujourd’hui, mais je l’ai dominé.
Et maintenant, je vais le tuer... » Bon, il pincha, mais pincha bien !
L’estocade qui suivit lui mouilla les doigts, et fut contraire, pour
« atracarse de toro ! ». Pas d’oreille, bien sûr, mais
plus qu’une ovation. Le toreo n’est pas que « derechazos y
naturales... » Grand moment de toreo que dut apprécier, dans le
callejon, Manolo Vazquez, qui savait plier un toro impossible en restant
esthétique et artiste. Enrique Ponce n’a coupé qu’une oreille, hier,
mais il a été « cumbre » !
Stéphane Fernandez Meca a été « en
Stéphane ». Batailleur, rageur, puissant, il s’est battu en
gladiateur avec le terrible premier, et dut rendre, dignement les armes,
devant l’impossible quatrième... C’est la première fois que l’on
voit Meca jeter vers le callejon des regards de peur et d’impuissance.
On le comprend, on le salue avec le plus grand respect. Ce toro était une
saleté, « una caja de misiles », partant dans le bonhomme à
peine ébauché le muletazo, comme s’il avait déjà été toréé.
Malo de verdad.
Corrida de tension, corrida « muy
mala » de Victorino, sauvée par un grand toro. « Corrida mala »,
mais de grand intérêt, que l’on préfère, bien sûr, à certaines
« corridetes », où l’on coupe huit oreilles à des sardines
qui ne tiennent pas sur leurs piquets... Hier, les toreros ont été
« en toreros »... et non « en infirmiers »... Ce
qui n’empêche, que la corrida de Victorino est sortie « mauvaise »,
confirmant ainsi la temporada très moyenne du paleto de Galapagar .
2
Septembre – Bayonne – No hay billetes – Grand beau temps –
Plaza preciosa : Corrida
de Victorino Martin, impeccablement présentée, le premier plus léger,
plus bas ; le quatrième, haut comme un immeuble. Corrida qui sort
agressive, avec une grosse caste, pas toujours de la meilleure. Violent et
court, le premier que le matador laissa « cru », après trois
piques chargées de loin, mais peu de châtiment. Faible et retenu, le
deuxième, qu’il fallut pousser, tirer. Sans se définir, le troisième,
qui s’engouffrait dans le premier muletazo, pour freiner et coincer,
dans le suivant. Impossible le quatrième. Malo et faible, avec sourd
danger le cinquième... et, extraordinaire le sixième, noble avec une
larme de soseria, accentuée par un torero lui-même un peu fade.
Stéphane Fernandez Meca, a qui avait été
remis le Prix Claude Popelin de la Saison 2000, attaqua fort, d’entrée :
Capotazos puissants, rageurs, au nerveux premier. Mise en suerte vibrante,
voulant, par trois fois « lucir al toro ». Trois piques de
loin, mais de fait, peu de châtiment, Stéphane retrouvant un animal
brusque, violent, court dans sa muleta. Sacrée empoignade, le torero se
lançant à fond, avec courage et savoir faire. On ne parle, ici, d’esthétique,
mais de vrai combat, dont certains « flashs » furent
d’une grande beauté esthétique. Un vrai combat et une grande
oreille, dignement coupée, après une entière un poil tombée. Fernandez
Meca avait ici fait honneur à son brindis « aux compagnons d’un
jour », et on l’espère, d’autres encore... Le quatrième fut un
« super dangereux », dès les premiers muletazos, après que
le Chano se fut encore illustré en deux paires de banderilles de grosse
émotion. Meca essaya de faire face, tandis que le public murmurait sa
crainte. A mi trasteo...impossible! « Que
hago yo ? » semblait demander Meca au burladero ?
L’estoquer ! Ce fut fait, avec une sale poursuite et quelque regard
éperdu. On le comprend, o combien ! Vuelta pour le français...
Vuelta de salut au courage et à la dignité, même si « no pudo con
el toro ! »
Enrique Ponce dut avoir la chair de poule
quand, avant que ne sorte son premier, une ovation monta doucement des
gradins, tournant à l’unanimité, au point qu’il dut aller saluer
l’ovation, avant le premier capotazo. Superbe moment de coeur et d’aficion.
L’actuacion du Valenciano fut « cumbre », tant au capote,
manié avec douceur, précision, plastique indéniable, qu’avec une
muleta, engagée et très technique. De plus, l’épée fut à la
hauteur, et l’on ne fera pas reproche des deux pinchazos portés haut,
lors du deuxième combat. Ponce a été « en Enrique Ponce 2001 »,
c’est à dire : « Je ne lâche pas, tant que je n’ai pas réussi
« la série », « le moment » qui me satisfont
« à moi ».. et, de ce fait, devraient satisfaire les
aficionados buenos . Magnifique capeo au deuxième qu’il
devina un peu faible. Lançant le capote « loin devant »,
Ponce dessina trois véroniques suaves, en mettant les reins, terminant en
une grande demie. « Ya esta ! » Faena technique, à un
toro qui ne se livre jamais, qu’il faut aller chercher, de la voix, de
la zapatilla, du toque.. Ponce s’y accrocha jusqu’à en sortir une série
de naturelles irréprochables, libérées d’un grand pecho. Le toro ne
se livra jamais. Le torero, toujours, et plus encore sur un énorme coup
d’épée, qui, à lui seul, valait l’oreille. Le cinquième sortit
d’un puyazo en trébuchant, s’explosant le piton dans la caillasse,
sous le sable. Ce toro arriva court et pleins de regards en dessous,
jouant les faibles, trompant le monde. Ponce « essaya »,
tandis que le climat changeait, dans les gradins. Voyant qu’il n’y
arriverait pas, le torero de Chiva s’embarqua pour un macheteo genoux
ployé, très technique, très esthétique, torerisimo, terminant par un
desplante de domination. Pinchazo sur une banderille, un autre et grosse
entière contraire, en se mouillant les doigts. Ovation pour un torero qui
n’avait absolument pas besoin de ce geste, pour être l’indubitable
« Numéro Un » actuel.
Abellan fit office d’enfant de choeur,
auprès de ses deux collègues. Courage et engagement, certes, mais aussi,
une impression de limite technique, face au troisième, qu’il ne put
dominer, au point de prendre un terrible derrote au menton (imaginez :
quelque centimètre plus haut ou plus bas !), et de manque total
d’imagination, de « libération artistique » face au sixième.
Ce toro lui permettait de « rêver le toreo ».. Il ne lui
permit que de longues séries de derechazos bien récitées, et trois
naturelles de face, difficilement soupirées en fin de trasteo. Il était
parti pour deux oreilles, en perdit une, lors de la faena, et la deuxième,
après une entière bien poussée qui tarda, tarda, tarda... à faire son
effet. Tarda le temps de deux avis... Le toro devint impossible à
descabeller et le bras levé du triomphateur devint « geste
d’impuissance et d’excuse » devant la colère des gradins où
l’on veut bien voir « mourir » les toros, mais vite.. même
si c’est d’un bajonazo. Heureusement, la majorité se rappela que
l’estocade, somme toute, avait été bien portée, et l’ovation
couvrit enfin les sifflets. Bien... Mais il n’empêche que ce toro était
« de dos orejas » et « de vuelta al ruedo ». Le
ciel aficionado n’en a pas voulu ainsi... C’est à la fois, très
malheureux.... et très juste !
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