BAYONNE : JULI ET LE GRAND BAIN !
2 Septembre : Que dire après la démonstration
de « vouloir et de pouvoir » de ce phénomène que l’on
surnomme « El Juli », hier, en plaza de Bayonne ? Que
nous sommes bien en présence d’un phénomène qui, lorsqu’il y a
« grande occasion », s’en va loin, nager dans le grand bain,
tandis que les autres batifolent dans la pataugeoire.
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En parlant de « grand bain »,
on peut aussi s’attarder un instant sur « le bain » qu’a
mis Julian Lopez à un Jose Tomas, perdu dans ses pensées, emprunté, toréant
de la pointe de la muleta, foulant le sable de Lachepaillet sans en
vouloir déplacer un grain. Les areneros lui en surent gré, alors
qu’ils eurent « double ration » de travail avec le Juli, qui
lui, « lorsqu’il plante les pieds... »
Les toros d’Algarra, bien présentés et
sérieux de tête, sont sortis bizarrement, sans la grosse faiblesse
qu’on pouvait craindre. Il n’y eut pas de meilleurs et de pires. Il y
eut des toros qu’il fallait convaincre... qu’il fallait mater, dès le
début. Un torero l’a fait, El Juli. Il l’aurait peut être fait avec
chacun des six. Un torero n’a pas pu, avec des excuses, et un autre
s’est carrément moqué du bon peuple qui, pas rancunier pour un sou,
lui en a même fait ovation.
Juli a montré une autorité, une
intelligence, un dynamisme tels, que les toros « se sont mis au
garde à vous » et on filé « presque doux ». Curro
Vazquez s’est ménagé quelques garanties. Les ans et les coups en sont
la raison. Cependant, on lui doit de gros détails, en particulier
« La » demi véronique de la tarde... et de plusieurs. Jose
Tomas a joué « les
mazettes », gêné par des toros qu’il aurait, il y a peu,
« pliés en dix huit ». Estuvo mal ! Sans sitio, sans idées,
sans recours... et donc sans réussite.
Pour ce qui est du « duel »,
valait mieux, hier, aller voir « du côté des Verts ».
Noël est reparti « chez sa mère », Alain essaie de
rassembler « lipietz » manquantes (pardon !), et
Dominique, (nique nique!)... ne sait plus où donner de la démagogie. Enfin
un duel qui promet ! Il va y avoir du monde au balconcillo... et en
plus, c’est gratuit. Pauvre France !
Bayonne brillait de mille soleils et la
plaza était une merveille, pleine comme un oeuf, avec, de ci de là, au détour
de quelque tendido, des gloires du toreo que l’on prétend « vieilles »,
mais qui sont, tout simplement, éternelles : Manolo Vazquez,
Antoñete...
Et puis, la jeunesse... aux côté de son père, bronzé et détendu... le
fils d’Emilio Muñoz. Qui sait ?
1er
Septembre - Bayonne – No hay (vraiment) billetes ! :
Six toros de Luis Algarra, très bien charpentés et sérieux de tête.
Tous sortirent fort, rematant violemment, dans les burladeros, chargeant
avec violence dans leurs premiers assauts. Il y eut plusieurs toros au
comportement bizarre, comme ce premier, un véritable chat, bondissant sur
tout, avec des yeux partout ; comme ce deuxième qu’on pouvait
craindre affublé de quelque défaut de vue ; comme ce cinquième qui
se fracassa dans un burladero, sans que personne n’en porta
responsabilité. Choc d’une violence extrême dont le pauvre toro sortit
les naseaux en sang. Les deux toros du Juli ont paru les meilleurs...Bon !
Ils ont paru les meilleurs ! De fait... le Juli les a faits
probablement meilleurs qu’ils n’étaient.
Curro Vazquez (légers sifflets et bronca)
n’a pas pu, avec le premier, N°77, qui, déjà dans les corrales, le
matin, « veillait à tout », inquiet, voulait en découdre. Le
toro sortit violent, et se trouva devant un maestro « dubitatif »
pendant la lidia. Mobilité
« molesta » de ce toro... Toro qui, après deux piques, arriva
un poil descompuesto, prenant bien le muletazo, mais tirant aussitôt un
gros hachazo en bondissant, et ne laissant pas le torero « tranquille ».
Il ne fallait pas cela au vétéran qui souffla court et rendit feuille
presque blanche après un pinchazo feo et une atravesada. Le quatrième
sortit fort, rematant dans les planches. Curro Vazquez le reçut par
d’amples lances clôturés d’une demi véronique extra, qui reste un
des gros moments de la tarde. Cette fois encore, le maestro « manquera
de présence » dans la lidia, mais essaiera, ébauchera des
choses, à la muleta, que le public ne voulut pas voir. Début de faena
« d’espoir », avec deux ayudados et une série de droite, décidée.
Mais il fallut déchanter. Le toreo fondamental, lié sur chaque main, lui
échappant, Curro Vazquez « essora » les dernières charges du
toro, en adornos « marca de la casa », qui sont aussi « le
toreo ! » Certes, il n’y eut pas quatre séries de
derechazos et trois de naturelles (le toro ne les avaient pas) mais le
public aurait pu mieux recevoir ces remates et ces adornos « andandole
al toro » sur les dernières demi charges. A l’épée, un petit
calvaire, et personne ne voulut entendre parler de celui qui coupa un
jour, ici, quatre oreilles et un rabo. Certes, c’était en...1969.
Jose Tomas (ovation et applaudissements
chaleureux) est venu, a fait deux tours du quartier, l’air songeur et le
nez en trompette, puis s’en est allé vers ses pensées, qui semblent de
plus en plus noires. Son premier semblait ne pas voir de près, fusant de
loin sur le cheval ou un banderillero, laissant le maestro les sourcils en
point d’interrogation. Cependant, il arriva à la muleta, certes tardo,
mais pas impossible pour qui voulait s’y mettre, et surtout « s’y
croiser »... Tomas essaya en douceur, sur les deux mains, tirant
deux ou trois muletazos qui
promettaient, puis s’enlisant dans le doute et l’élégant ennui.
Pinchazo hondo en bonne place, et le public qui applaudit... « parce
que c’est Jose Tomas ». Quel aurait été, par exemple, le sort réservé
à Eugenio de Mora après semblable prestation ? Hein, Bayonne ?
« Tres cuartos de lo mismo » devant le cinquième qui percuta
si violemment les planches qu’il s’en ressentit forcément au cours de
la lidia. Un demi vuelta de campana n’arrangea pas les affaires. Toro
qui tomba et fléchit plusieurs fois, mais toros bravo et toro de faena.
Jose Tomas va distribuer des demi muletazos, avec une obsession :
arriver au moment où il pourra se situer « en corto », dans
ce terrain et cette attitude qui sont les siens, pieds joints, de profil,
le corps cambré, citant, la muleta « à peine sortie », pour
de muletazos courts, mais de gros impact. Ce fut, là aussi, là aussi, un
fiasco, le toro « ne pouvant plus », et le torero ne s’y
arrimant pas. A son actif, un demi estocade engagée, restant un peu sur
la face. Mais vraiment, quelques lumières se sont éteintes chez ce
torero qui ne pouvait, hier, se présenter à ce duel, avec si peu
d’ambition. Les lumières se sont éteintes... restent les clignottants !
« Llego, vio... y la monto ! »
Assailli de toutes parts, avant le paseo (Il va falloir, vraiment, songer
à faire « quelque chose », dans ce patio de caballos, avant
la corrida ), le visage mi-caché par un léger pansement, le nez et la lèvre
que l’on devine tuméfiés, mais l’oeil clair et le verbe haut, Julian
Lopez « El Juli » est venu, a vu, et... a conquis tout le
monde, coupant deux oreilles fortes, malgré des épées un peu douteuses,
mais follement poussées. « Este es un fenomeno ! y ya esta »
Le Juli venait chercher le triomphe qui lui manquait, dans le sud ouest.
Il l’a, et le mano a mano de dimanche prochain, avec Enrique Ponce, à
Dax, promet beaucoup. On suppose qu’il a touché « les deux
meilleurs ! ». A voir. Des toros nobles, certes, mais parce
qu’il les a libérés, mais des toros qui se sont vite éteints (le sixième
durant un peu plus) mais qu’il a pressés comme des citrons, mettant la
verve, le panache qu’ils n’avaient pas, après les avoir, auparavant
« passés sur les deux mains » en longs muletazos templés à
fond, liés, et clos de monumentaux pases de pecho. Quand le toro ne veut
plus, « on se met dedans », littéralement « dedans »...
et, forcément, ça marche. Qui résisterait à un tel engagement, à une
telle rage de vaincre. Ajoutons à cela une cape autoritaire et
chatoyante, qui dans les véroniques et la demie pieds joints « de
cartel », qui dans les quites par chicuelinas du premier, ou par
caleserinas au second.... Ajoutez à cela des banderilles « tous
terrains », avec un monumental « por dentro » et des
poursuites musclées. Tout le monde debout ! Saluez ! La muleta
tire le toro, le mène où elle veut. Puis, quand le toro ne peut plus,
elle pendule vaillamment derrière le corps offert, à deux doigts des
cornes, comme au troisième... ou elle embarque le toro pour de dernières
virevoltes à tour complet, comme dans les trois roblesinas, au sixième.
Torero de passion, d’Aficion. On pousse tous derrière lui, avec l’épée.
Il y aura, chaque fois, pinchazo, mais la deuxième attaque sera « terrible »,
et, même si l’épée est partie un peu de côté, mettant du temps à
faire effet, on ne peut s’empêcher d’admirer, de sortir son mouchoir
et de tirer son chapeau ! Un fenomeno ! Un torerazo !
Bayonne
de passion, Bayonne d’Aficion... Deuxième manche, aujourd’hui, avec
les Victorino, et un cartel « de luxe » : Fernandez Meca,
Enrique Ponce, Miguel Abellan. « Suerte... para nosotros, y, claro ,
para todos ! » - Attention : paseo à 17h30., et, ce
matin, finale des non piquées, à 11h
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