Est-il
vraiment le fils de Manuel Benitez "El Cordobes"? La loi l'a
accepté. Peut-il porter le nom artistique du "Cordobes"? La
loi l'y a autorisé.
Mais, au-delà de ces joutes juridico-familiales, qui ont
fait, par-delà le malaise et la douleur, les choux-gras
de la presse du cœur, nom pudiquement donné à la
presse à scandale, il y a un homme, un torero.
Ou Manuel Diaz est le
fils du chevelu de Villalobillos, ou il en a vu tous les
films, toutes les photos, lu toutes les biographies, étudié
toutes les anecdotes, les coups de folie. Ce n'est pas
du Benitez, c'est comme du Benitez... En fait c'est du
Manuel Diaz.
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Et
c'est là qu'on arrive a un espèce de psychodrame, qui mobilise tout le
monde, et finit par desservir le torero, s'il ne déroute pas l'homme.
Les aficionados de tous âges, aiguillonnés par le rébachage médiatique,
vont sans cesse chercher à percer le secret: Fils ou pas du célèbre
"El Cordobes"? La loi, ici, n'aura pas de place: les anciens
essaieront de retrouver ces gestes, ces attitudes, devant et hors du
toro, qui leur feront revivre leur aficion et qui effaceront leurs
doutes: "Il est bien le fils de son père". Les jeunes
aficionados, qui n'ont pas connu Manuel Benitez, sinon peut-être,
entrevu lors de son dernier retour valable de 1980, vont vouloir se
faire une image, une opinion: "Il est comme le Cordobes des années 60, dont on
m'a parlé..." Et le jeune homme est là, au milieu, jouant un rôle
qui, certes, a du lui rapporter argent et position sociale, mais
n'arrivant pas, dans le ruedo, à se définir comme torero, tantôt
admirable, tantôt horripilant, décidément très loin de valoir son célèbre
géniteur, grand inventeur du "saut de grenouille".
Manuel Diaz, qui n'a ni la personnalité,
voire le génie, ni les facilités naturelles du Benitez - ceinture,
poignet, main gauche - s'évertue à l'imiter, voire le parodier, sans
pour autant arriver à passionner la foule, aficionada ou pas.
Du coup, cantonné dans cette hérésie, Manuel Diaz, garçon
hyper-sympathique et pourvu de ses qualités toreras propres, piétine
et se cantonne au rang du torero populaire qui n'atteindra jamais celui
de l'idole. C'est peut-être mieux ainsi, mais c'est à la fois dommage
pour le torero, et pour l'homme, condamné à jouer celui qu'il n'est
pas.
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Dommage pour le torero. Pouvant être excellent à la cape, ce que n'était
pas le papa, Manuel Diaz, tantôt baroque, tantôt classique est capable
"de mettre le feu, à la façon de" ... dans les plazas de
troisième catégorie, sans pour autant faire exploser l'audimat. On
sourit, tout au plus, en le voyant donner la vuelta à l'allure d'un
finaliste du 200 m aux jeux olympiques... Quelle allure ! Mais, El
Cordobes junior est aussi capable, devant les regards ébahis, de toréer
classique, templé, lié, suave, loin des clins d'yeux et des grimaces
(référence: le toro de Samuel à Dax). Comme il est, par ailleurs,
tueur sûr, on est en présence d'un bon torero, prisonnier d'une image
qui n'est pas la sienne, et qui ne peut que continuer dans ce registre,
sous peine de ne plus intéresser personne.
Trois éléments réunis
permettent à Manuel Diaz de parfaitement fonctionner malgré le
fait de ne jamais avoir triomphé dans une feria de première
catégorie, (à part quelqu'éclair à Valencia et Bilbao): Tout
d'abord, la sympathie qui émane de lui son ardeur et ses qualités
toreras propres, indéniables. Deuxièmement, une parfaite
administration, qui sait exploiter le filon et fonctionne sans déranger
le "Système". Enfin, le manque de culture taurine des
masses nouvellement arrivées à la tauromachie, exploitées par
les diverses presses du cœur, écrites, télévisées, qui ont
tellement vendu en comtant l'histoire du jeune torero seul,
pauvre, abandonné par son richissime père... aujourd'hui marié
à la fille d'un célèbre ganadero-empresa-homme d'affaires. |
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Les plazas se sont remplies, la Presse à vendu, le garçon a gagné de
l'argent.... Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il
n'empêche que le torero et l'homme méritaient plus... et le nom, de même... |