FERIA DE BILBAO 1970

FERIA DE BILBAO 1970

      Huit corridas, du 16 au 23 août. Cordobes  ne vient pas, c’est clair. Ordoñez se laisse annoncer, puis tombe, au dernier moment. Les deux tambours majors laissent les autres affronter la Semana Grande, où l’on sait qu’il y aura du trapio et du bois. Bases de la feria, pour diverses circonstances : Diego Puerta et Paco Camino, qui s’annonce avec les Miura, de même qu’Angel Teruel dont la temporada n’est pas brillante.

 

      16Août – Les toros du Marquis font le vide :  Un bon lot gaspillé par les hommes. Bien présentés, (518 Kgs de moyenne), encastés et braves, à part le cinquième, les toros du Marquis prennent 20 piques en partant de loin. Ils poussent, sortent parfois seuls, mais reviennent et appuient. L’ensemble offrait des possibilités, à part le cinquième. A part Juan José, les toreros furent dépassés. José Falcon donna une vuelta au premier qu’il tua bien après avoir été brillant dans le brega et aux palos. Par contre, même là, il fut dépassé par le quatrième – Juan José n’eut pas de chance au sorteo, essaya vaillamment de corriger le deuxième. Il dut renoncer. Le cinquième fit mentir le dicton et se révéla « muy malo ». Le salmantino ne reccueillit que deux silences – Il y a longtemps que El Hencho a rendu le triomphe de  la Miurada de Séville. Le public basque respecta en silence celui qui se met devant le toro, mais n’en pensa pas moins – A mi-corrida, les frères Peralta toréèrent de concert un Tassara. Suberbe, jusqu’au moment de la mort, où cela se gâta tout rouge. Un avis.

 

       17 Aout – Marquez et Gonzalez coupent, mais c’est du Viti qu’on parle : La corrida d’Atanasio va connaître des problèmes avec les vétérinaires. Deux sont refusés, remplacés par deux Chopera, sortis 5 et 6ème. Finement armés, les Atanasio manifestèrent une grosse baisse de caste et de la faiblesse, comme le troisième. Il y eut quelque reste de noblesse, en demie-charges désordonnées. Le meilleur fut le quatrième. Les Choperas sortirent solides et coriaces - El Viti patauge et tue mal son premier, mais, secoué par le succès de ses jeunes camarades, il va dessiner au quatrième, « la » faena de la tarde, toute en douceur, rallongeant la charge, agrémentant le trasteo de remates  et d’adornos bienvenus. Hélas, il tue en trois voyages. Grande ovation – Miguel Marquez coupe une oreille à son premier et donne vuelta à l’autre. Super triomphe ? En fait, un toreo sincère, vaillant, habile, mais sans profondeur ni chispa. Séries liées, final à genoux, épées faciles. Pas génial, mais… ça marche – Damaso Gonzalez commença très fort au capote : cinq véroniques lentes. Il fut sérieusement dépassé par le sixième, mais coupa l’oreille du candide troisième, après une faena de 53 passes, faites de gestes, d’attitudes et de bravades, portant plus sur le public que le toro.

 

     18 Août – Avec le souvenir de Manolo Cortes : Les toros d’Osborne Domecq étaient bien présentés (550 Kgs de moyenne). Pourtant, ils ne tinrent pas leurs promesses. Le 6ème, flojisimo aurait dû être rentré. L’ensemble manqua de caste, excepté le quatrième qui dérouta Manolo Martinez. Décidément, le mexicain ne prouve rien ici. Silence et grande bronca – Miguel Marquez ne put bouger les 609 Kgs du second, mais donna une vuelta après avoir vaillament toréé le cinquième – La surprise du jour vint de Manolo Cortes et de sa faena juste et très esthétique face au troisième auquel il coupa une oreille méritée. Hélas, il tomba sur l’invalide dernier, et le public ne put fêter comme il se devait, la grande prestation du sévillan.  La faena de Cortes, un des grands souvenirs de cette féria.

 

     19 Août : « Sauve qui peut » pour Puerta et Camino : En ne venant pas, Antonio Ordoñez a eu le nez creux. La corrida de Salvador Domecq, très bien présentée (507 kgs de moyenne) et surtout très armée, a semé la panique chez les toreros. En mano a mano, Diego Puerta et Paco camino ont fait assaut de précautions, assorties de coup tordus. No los quisieron ni ver ! Broncas pour tout le monde. Le sixième toro aurait probablement permis à un Camino plus motivé, de s’illustrer. Ce fut un massacre, et le public se fâcha encore plus. Il y eut, à plusieurs reprises, pluie de coussins dans le ruedo, et les toreros sortirent en voltige. Scandale majeur.

 

     20 Août – Le pardon pour Diego Puerta ! : Les toros de Bohorquez, bien présentés (548 Kgs de moyenne), se sont montrés sosos, rapidement éteints. Le quatrième permit le rachat de Puerta, et la question reste posée, au sujet du cinquième, peut-être le toro de la feria. On ne le saura jamais, car El Viti ne voulut pas voir ce toro brave et noble. Bronca « de ordago » ! -  Puerta, vexé de sa triste sortie de la veille et des commentaires qui s’en suivirent, mit toute sa hargne à gagner la bataille. Echec au premier, impossible, mais 25 passes puissantes, face au quatrième, estoqué en deux temps. Oreille méritée pour Diego à la valeur retrouvée – Angel Teruel connut le succès : Oreille et vuelta. Pourtant, son toréo précieux, face à des toros ternes et faibles, manqua totalement d’émotion.

 

     21 Août – Deux oreilles et l’infirmerie pour Damaso : Corrida de Buendia. Bien présentés (522 Kgs de moyenne) et racés, ils donnèrent une corrida intéressante. Corrida encastée, plus noble que brave, les deux derniers baissant rapidement le ton. Damaso Gonzalez a surpris tout le monde dans une bonne faena, très classique, au troisième. L’abondance, bien sûr, mais également une grande qualité, le temple. Grosse estocade et deux oreilles méritées. Hélas, il se blessa au toro suivant, en essayant de faire le quite au picador déséquilibré, dont la pique vint malencontreusement blesser l’albaceteño, à la main gauche. Grave coupure, avec un tendon a demi sectionné – De ce fait, Diego Puerta prend trois toros. Cela se passe mal avec « les siens », et Diego entend une méchante bronca au quatrième. Heureusement, il se reprend, dessinant une faena vibrante face au dernier, qu’il tue en trois étapes, écourtant une ovation, style « Va en paix, nous ne t’en voulons point » - Paco Camino n’eut pas de chance au sorteo. Il toréa en cérébral, avec quelques bons détails. On l’applaudit discrètement.

 

      22 Août – «  701 Kgs de Miura » pour Paco Camino : La corrida rendait tout le monde nerveux, au sorteo. Un toro de 701 Kgs ! Et c’est Paco Camino qui le tire ! En fait, les Miuras vont sortir balourds, faibles et très mal armés. Astigordos ou super astillados.  Le cinquième boîte bas et se voit remplacé par un Martinez Elizondo. Le sixième ne vaut guère mieux. Dans l’ensemble, la corrida fut intéressante, mais s’arrêta au quatrième – Le deuxième Miura était un géant, mais « pas miura du tout ». Bravito, fade, mou, noble, il bougeait sa viande sans trop de malice. Très bonne faena de Paco Camino qui, par moment, disparaissait tout entier derrière cette montagne de chair. Tuant d’une épée entière, Paco Camino coupa une oreille qu’il garda soigneusement. « Un Miura de 701 Kilos… Ozu ! ». Applaudi, devant l’Elizondo, sans jambes, sans grand intérêt, ni possibilités – Curro Giron  fut excellent de professionnalisme face au premier. Il coupa une oreille après une mort un peu laborieuse. Il y eut vuelta posthume pour le Miura, hors de propos. Par contre, le vénézuelien fut malin, face au quatrième, très violent. Il toréa très habilement… le public. Il tua mal, ce qui réduit le succès à une chaude vuelta – Angel Teruel se débarassa d’un troisième, de 620 Kgs,  peu commode, armé très astillé. Il y eut un incident au sixième : Le toro était invalide et Teruel, voyant tout succès impossible, refusa de le tuer. On palabra, on le raisonna, et le madrilène, la mort dans l’âme, fierté en berne, s’exécuta. Bronca monumentale à la présidence, pour ne pas avoir changé le toro.

 

     23 Août – Final en « mansedumbre majeure » ! : La corrida portugaise de Coïmbra se montra dure à croquer : bronca, violente, ou au contraire amorphe, avec des regards en dessous. Bien présentés, les portugais se montèrent dangereux  et auraient pu mettre la panique dans le ruedo, sans la présence d’un super lidiador qui donna confiance à tout le monde : Jose Fuentes. Excellente prestation du jienense qui aurait dû couper l’oreille du potable premier, sans ces 10 maudits descabellos. Vuelta. Il se défit très adroitement de l’assassin quatrième – Manolo Cortes la                issa de côté les filigranes, et se montra très vaillant. On applaudit ses efforts devant des clients impossibles – Jose Luis Parada que l’on pouvait croire bien fragile, se surpassa devant le sixième, le toréant sur les deux côtés, dans une faena « a mas ». Personne n’aurait parié sur lui, face à un tel toro. Encouragé par Fuentes, le sanluqueño prit confiance, et faillit bien couper une oreille, donnant la dernière vuelta de la feria .

 

     BILAN : Feria de Bilbao, dans l’ensemble, grise. Huit corridas, beaucoup de présentation, de kilos et de bois, mais du côté « ramage », ce fut plus douteux. La corrida du Marquis de Domecq  présenta le plus bel ensemble,  et il y eut quelques bons exemplaires, d’Atanasio, de Bohorquez, de Buendia, et le premier Miura. Mais dans l’ensemble, la feria « manqua de caste ».

     Chez les hommes, Il y eut neuf oreilles sur les 48 « coupables »… Damaso Gonzalez  fut le plus récompensé, avec trois oreilles, suivi de Marquez, Cortes, Teruel, Puerta, Giron et Camino, au « 701 » de Miura. Mais les bons souvenirs de cette feria 1970 portent les noms de : Viti, Manolo Cortes et Jose Fuentes. Cependant, tout cela disparaitra derrière …701 Kilos de viande.